Chichilianne dans le Vercors, samedi 4 juillet 15h. température approximative 100° Fahrenheit.
Je me
retrouve là, un peu par hasard. Embarquée à la dernière minute
par des amis pour me changer les idées, je retrouve des
gens que j'apprécie, mais que je n'ai pas vus depuis (trop)
longtemps, le paysage est magnifique, l'ambiance est festive, j'ai un
équipement tout neuf et des pansements pour les ampoules... je suis prête.
On
est trente six à tenter l’expérience, dont certains enfants, je me dis
donc que c'est à la portée de tout le monde et que ça va le faire
grave. Quand le chef de rang donne le top départ, j'ai le sourire et
je l'ai gardé sur au moins... cent mètres.
Ok je
me suis peut-être un peu emballée sur mes capacités physiques et,
si l'amitié donne des ailes, celles-ci étaient sans doute déjà
occupées avec d'autres amis dont le programme leur convenait mieux.
La
chaleur est étouffante, ça cogne si vite contre mes tempes qu'il me
semble que mon sang est en train de bouillir. Le groupe se sépare,
chacun trouve son rythme de croisière et, moi, à la traîne, je
rêve de croisière justement ou juste d'eau ; des pieds à la
tête... avec des glaçons.
Lorsque
je retrouve une partie du groupe qui profite d'un coin d'ombre pour
faire une pause, la seule chose qui m'empêche de m'allonger, c'est
la peur de rouler jusqu'au point de départ.
Je
vois sur les visages rougis que je ne suis pas la seule à me
demander quel genre d'homme peut vouloir subir ça et le faire subir
à ses amis pour fêter ses quarante ans ! Je reprends mon
souffle tant bien que mal, descends ma première bouteille et tente
de garder un semblant de contenance... après tout, on a parcouru que
le quart.
Très
vite je me rends compte que ça ne va pas le faire. Pas de cette
manière en tout cas.
Je
fais dix mètres, je m’arrête, je respire, je repars.
Dix
mètres de plus, nouvelle pause, cette fois je lève les yeux...
pu*** que c'est beau.
Je
suis toute seule, dans un paysage qui ne ressemble à rien de ce que
je connais et, l'air de rien, j'avance. Finalement, la durée du
trajet n'a plus d'importance. J'arriverai lorsque j'arriverai et il
sera toujours temps de faire la fête. Je profite de ce moment où,
bien qu'à bout, mon corps continue de m'obéir et d'avancer.
Je
pense à tous ceux que je retrouverai là haut, à la soirée qui
nous attend, à cette nuit hors normes et finalement je me rends
compte que l'endroit où je croyais avoir rendu l'âme est bien loin
derrière moi.
Bientôt
je retrouve des silhouettes amicales qui me demandent si
je vais bien... J'ai mal aux jambes, j'ai chaud et soif, mais oui je
vais bien.
Bor*** je vais même carrément bien !
"Viens
voir, Solange. On se croirait sur Palum !"
Son enthousiasme regonfle le mien, je parcours les
derniers mètres plus raides que les autres, j'évite de me casser la
figure à plusieurs reprises et me voilà.
L'endroit
est magnifique. L'air y est plus frais. Et un peu plus loin devant un
refuge, un petit groupe brise
déjà le silence de la montagne de rires et de vannes.
Le temps de se féliciter les uns les autres, de se rafraîchir à la
source et déjà les premières bouteilles sont de sortie.
Et
finalement, je me dis que c'était une idée géniale pour un
quarantième anniversaire !
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